DEVOIRS & CORRECTIONS – Géographie, « La Chine des recompositions spatiales multiples » Question du manuel Correction

COURS À DISTANCE

Thème IV – « La Chine : des recompositions spatiales multiples. »

Question 10 « Développement et inégalités socio-spatiales en Chine. »

(11) Développement économique et accroissement des inégalités socio-spatiales en Chine aujourd’hui.

Dossier

« La Chine, quelles recompositions spatiales ? »

Analyser des cartes

  1. Comment les « nouvelles routes de la soie » peuvent-elles renforcer la place de la Chine dans la recomposition du monde ? 

                                Depuis 2013, le gouvernement chinois fait la promotion d’un grand projet de construction d’infrastructures routières, ferroviaires et maritimes destiné à améliorer le raccordement de la Chine avec le Reste Du Monde (RDM). Si le projet à changé de nombreuses fois de noms dans la propagande chinoise, il a aussi changé d’envergure et de destination. D’abord ferroviaire et destiné à relier l’Asie du Sud-est (Bangkok, Kuala Lumpur) à l’Europe (Berlin, Rotterdam), il est devenu une sorte de programme global, maritime et terrestre, destiné à relier la Chine avec ses fournisseurs (Afrique, Asie du Sud-est), avec ses marchés clients privilégiés (Europe, Amérique du Nord) et ses marchés émergents (Amérique du Sud). Les « Nouvelles routes de la soie » sont devenues un outil géopolitique d’affirmation de puissance dans un monde où, depuis la fin de la « Guerre froide » (1947-1991), les recompositions géopolitiques sont nombreuses, où les équilibres anciens n’ont pas été remplacés par des équilibres nouveaux et où la Chine entend jouer, maintenant, un rôle de premier plan.

                À l’échelle mondiale la carte extraite de l’article « La Chine tisse sa toile », (dossier « Atlas des nouvelles routes », Courrier international, hors-série de septembre-octobre 2018), permet de comprendre que les « nouvelles routes de la soie » sont un outil économique qui permet à la Chine de sécuriser ses voies d’approvisionnement (Pétrole du Soudan via Port-Soudan, pétrole d’Angola via la ligne ferroviaire Dar es Salaam en Tanzanie vers Lobite en Angola), ses pays ateliers (Bengladesh, Sri Lanka, Cambodge). Les « nouvelles routes de la soie » permettent aussi de sécuriser les voies d’accès aux marchés (Europe et l’Union Européenne, l’Asie et l’ASEAN, l’Amérique du Nord et l’ALENA, l’Amérique du Sud et le MERCOSUR). Mais aux échelles régionale et nationale les « nouvelles routes de la soie » sont aussi un outil de puissance : la construction de voies ferrées dans l’Ouest de la Chine permet d’y renforcer l’implantation de Hans, de marginaliser la population musulmane ouïghour victime d’une violente répression, de surveiller la province du Tibet, annexée par la guerre en 1950, bref de renforcer le contrôle de Pékin sur ses marges. L’extension des voies modernes en Asie centrale permet de renforcer le soutien apporté par Pékin aux anciennes républiques musulmanes de l’URSS, des dictatures qui sont menacées par des guérillas islamistes que Pékin combat aussi sur son sol. Le renforcement des liens entre Pékin et le Pakistan, le Bengladesh, le Népal, le Cambodge et le Sri Lanka est aussi un moyen de marginaliser l’Inde, le grand ennemi régional.

                Les « nouvelles routes de la soie » sont donc un moyen de soutenir la croissance économique en accordant des subventions publiques déguisées aux entreprises chinoises destinataires des marchés, de sécuriser les approvisionnements et les marchés mais aussi de transformer ces avantages économiques en outils de puissance.

  1. De quelles parties du territoire chinois pourraient-elles favoriser le développement économique ? 

                                Deux parties du territoire chinois pourraient être favorisées par le projet des « nouvelles routes de la soie » s’il venait à être confirmé, car pour l’instant il s’agit plus de déclarations d’intentions que de réalisations tangibles. Il s’agit d’abord du Sud-ouest de la Chine, les territoires situés à l’Ouest de Chongqing par exemple, il s’agit ensuite des territoires à fortes contraintes que sont le Xinjiang (Ex-Turkestan chinois) région désertique peuplée de populations ouïghours d’origine turco-mongole, et le Tibet, région de haute montagne.

                Le développement chinois qui s’est opéré à partir de l’ouverture économique de la Chine (1978-1979) avec les « quatre modernisations » a favorisé d’abord les littoraux, et notamment ceux, très urbanisés, autour de Shanghai et de Guangzhou, puis les régions d’arrière-pays, notamment celles irriguées par les deux grands fleuves Yangzi et Huang He. Les régions du grand Ouest (Xinjiang et Tibet) sont aussi des régions qui subissent le joug de Pékin : le pouvoir central favorise les migrations massives de Hans afin de marginaliser les populations autochtones. La répression contre les populations ouïghours du Xinjiang est particulièrement féroce puisqu’on estime à près de deux millions les Ouïghours détenus dans des camps de concentration et astreints aux travaux forcés. Le projet des « nouvelles routes de la soie » permet donc aussi de poursuivre des buts de politique intérieure en renforçant la présence des forces de sécurité dont le travail de surveillance politique est facilité par la modernisation des infrastructures de transport. Tandis que les implantations massives de Hans sédentaires permettent de faire basculer les rapports de force démographiques en faveur de la capitale.

  1. Quelles sont les inégalités territoriales engendrées par quarante années de développement économique accéléré ? 

                                Quand DENG Xiaoping lance entre 1978 et 1979 la politique des « quatre modernisations », il ouvre des portions du littoral chinois aux investissements étrangers dans des territoires strictement circonscrits que sont les Zones Économiques spéciales (ZES). L’extension des ZES se fait dans le cadre de la doctrine du « Socialisme de marché » qui permet au pouvoir central de libéraliser l’économie tout en maintenant la présence de très grandes entreprises publiques, notamment celles appartenant au puissant complexe militaro-industriel chinois dominé par l’Armée Populaire de Libération (APL). L’économie se libéralise au mitan des années quatre-vingt dix, amenant des taux de croissance à deux chiffres (+12% de croissance du PIB / an minimum entre 1995 et 2005) : les régions traversées par les grands fleuves (Huang He vers Tianjin, Yangzi vers Shanghai, et Xijiang vers Guangzhou et Hong Kong) se développent à un rythme très élevé.

                En revanche, la Chine intérieure reste rurale, voire paysanne, et pauvre : le littoral réalise 87% des exportations chinoises contre 11% pour les provinces de l’intérieur (Wuhan, Chongqing, Harbin) et moins de 2% pour le grand Ouest (Xinjiang, Tibet) enclavé et à fortes contraintes géophysiques (Données tirées de l’Atlas de la Chine, 2018, aux éditions Autrement, de Thierry SANJUAN et de l’Atlas de la mondialisation, 2018, de Laurent CARROUÉ, aux éditions Autrement également). En conséquence, le PIB/habitant/an est très inégal : plus de 72 000 yuans sur le littoral, 45 000 dans les provinces de l’intérieur et 40 000 dans les régions périphériques de l’Ouest.

                Cependant, la carte ne montre pas les inégalités encore plus importantes qui existent aux échelles locales : Wuhan le grand centre automobile de la République Populaire de Chine (RPC), est une ville riche dans une région de développement moyen. De la même manière Harbin et Chongqing sont des havres de richesses comparées aux campagnes pauvres qui les environnent. Dans les villes mêmes, y compris et peut-être surtout les plus riches comme Guangzhou et Shanghai, les inégalités sociales sont fortes : les travailleurs itinérants illégaux (Dans un pays qui conserve le système des passeports intérieurs) sont privés de droit, leurs familles également, les conditions de vie et de travail sont déplorables pour tous ces Mingong. Sans parler évidemment des inégalités liées à l’extrême corruption de l’appareil politique : les « Princes rouges » (Enfants issus de la génération des révolutionnaires de 1949) monopolisent le pouvoir et possèdent des fortunes indécentes en Chine même ou à l’étranger. Le paradoxe est étonnant : la Chine est un des derniers pays communistes du monde et possède le record mondial du nombre de milliardaires et de propriétaires de Ferrari…

  1. Comment le gouvernement chinois essaie-t-il de réduire les inégalités territoriales depuis les années 2 000 ? 

                                Le gouvernement chinois est conscient des fragilités causées à l’ensemble du système par la persistance des inégalités socio-spatiales. La politique d’industrialisation accélérée menée par MAO Zedong, DENG Xiaoping puis leurs successeurs a éradiqué la misère des campagnes chinoises en même temps qu’elle a éloigné le spectre des famines qui frappait le Chine depuis le milieu du XVIIIe siècle. Pour autant, dans un pays où les dirigeants ont imposé le maintient de la dictature totalitaire communiste en échange de la prospérité, la permanence d’inégalités territoriales criantes n’est pas satisfaisante. Des politiques volontaristes de rééquilibrages sont mises en œuvre.

                Des villes comme Ürümqi (Xinjiang), Xi’an (Shaanxi), ou Chongqing servent de relais à la diffusion de l’industrialisation et donc de la prospérité. Les grands projets d’infrastructure intégrés au méga projet des « nouvelles routes de la soie » permettent également la diffusion de l’emploi (Constructions d’autoroutes, de voies ferrées) et l’amélioration de l’accessibilité donc de l’attractivité de ces territoires en marge. Cependant, le littoral reste la région de Chine la plus attractive : les villes les plus puissantes s’y concentrent (Beijing, Shanghai, Guanzhou), devant de véritables mégalopoles (Comme Shanghai et son aire urbaine de près de 100 millions d’habitants), voire des villes mondiales (Pékin).

                Comme dans tous les États totalitaires et les dictatures, les inégalités socio-spatiales sont aussi la conséquence de politiques de marginalisation : le Tibet et le Xinjiang (Ex-Turkestan chinois), peuplés de non-Hans et de populations à la pratique religieuse vive (Dans une dictature athée), ont été volontairement laissés en marge de la croissance chinoise car ils faisaient l’objet d’une mise sous tutelle militaire et policière, et leur paupérisation était une des armes pour assurer le contrôle de Pékin. De même, les politiques de rééquilibrage territorial servent le renforcement de la présence et de la puissance du pouvoir politique à l’heure où les républiques d’Asie centrale voient se multiplier les groupes séparatistes ou terroristes. Dans le contexte géopolitique de guerre globale contre le terrorisme, les grands projets d’infrastructure servent amadouer et surveiller les populations jugées peu loyales des périphéries.

  1. Quels types de pollutions la carte met-elle en évidence ? 

                                La carte extraite de l’article « En Chine, la ligne rouge du virage vert. Niveaux extrêmes de pollution » (Le monde diplomatique, juillet 2017) de Céline MARIN met en évidence deux types de pollution : celle de l’air et celle de l’eau.

                Les niveaux de pollution de l’air sont impressionnants : là où l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) établit un seuil de dangerosité des particules fines (Moins de 2,5 micromètres) à 35 /m3, les seuils dépassent les 80 dans le bassin industriel et urbain entre Pékin et Nanjing (Atteignant les niveaux records de 180), et les 55 entre les fleuves Huang He et Yangzi. Les eaux sont considérées comme de très mauvaise qualité autour de Shanghai et sur les affluents du Yangzi et du Huang He.

Ce sont les pollutions liées au développement économique (Centrales thermiques, transport commercial routier, usines d’industrie lourde dans les ZIP…) et à l’accès des Chinois à la société de consommation (Automobile, consommation électrique) qui expliquent en partie les niveaux extrêmes de pollution observés en Chine. La preuve en est que les trois grandes régions enclavées et marginalisées par le pouvoir central (Tibet, Xinjiang, et la frontière avec le Vietnam) sont les moins polluées de la Chine… La crise du coronavirus et le confinement strict exigé par les autorités politiques chinoises ont montré que la pollution a drastiquement diminué, voire dans (certaines villes) a disparu, avec l’arrêt de la production industrielle et du transport routier.

Cependant, certaines régions pauvres et peu intégrées à la mondialisation sont aussi victimes de pollutions très graves : la technique de la fracturation hydraulique utilisée par les usines pour extraire les « terres rares » sont, par exemple, largement responsables de la pollution des eaux des nappes phréatiques et des nappes aquifères (Radioactivité présente dans l’eau) en Mongolie intérieure.

  1. Quelles parties du territoire sont particulièrement touchées ? Pourquoi ? 

                               Ce sont les régions les mieux intégrées à la mondialisation (Villes géantes, littoraux, affluents industrialisés des grands fleuves) qui sont particulièrement touchées. Le littoral autour de Shanghai est pollué (Eaux de très mauvaise qualité), les niveaux de pollution aux particules fines dépassent de trois, voire de quatre, fois les seuils de dangerosité émis par l’OMS. La pollution en Chine est d’abord le produit d’un développement économique accéléré (1990-2010) fondé sur l’industrialisation. En ce sens, la Chine est une mise à nu radicale des conséquences environnementales du capitalisme libéral.

Mais la pollution est aussi le produit d’une corruption généralisée à tous les niveaux de décisions dans les domaines économiques et politiques en Chine : les chefs d’entreprises comme les responsables du Parti Communiste Chinois (PCCC) n’ont jamais pris en compte le coût environnemental du laisser faire en matière de respect des règles d’hygiène et de sécurité.

                Les mentalités changent cependant. Sous la pression des citadins d’abord, excédés par les ciels aux couleurs étranges qui couvrent en permanence les grandes agglomérations : certains jours les habitants de Chongqing sont invités à rester chez eux tant la pollution de l’air  est extrême. Le gouvernement laisse l’exaspération populaire s’exprimer sur les réseaux sociaux quand il s’agit de la pollution car il invite les habitants à dénoncer les industriels qui polluent l’environnement. Cette politique lui permet d’abord de se concilier une opinion publique qui supporte de plus en plus mal les scandales liés au développement économique et ses conséquences environnementales. Cela lui permet également de procéder à des purges violentes au sein du PCC : XI Xinping a ainsi écarté les rivaux de ses protégés aux échelons régionaux et locaux en menant des campagnes de lutte contre la corruption et les atteintes à l’environnement. Il va de soi que les affiliés du président, eux, ne sont jamais l’objet d’enquête.

© Souleymane ALI YÉRO, Erwan BERTHO & Ronan KOSSOU (2020)

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