COMPOSITION Géographie Première « De l’espace européen aux territoires de l’UE. »

COMPOSITION

 De l’espace européen aux territoires de l’Union Européenne. 

Vous analyserez la politique de cohésion et de développement des territoires de l’Union Européenne en vous attachant particulièrement à montrer avec quels moyens et quels résultats une construction politique « à géométrie variable » tente de répondre aux disparités socio-spatiales de ses territoires. 

                 L’Union Européenne (UE) est aujourd’hui l’organisation continentale d’intégration économique la plus aboutie : marché commun, monnaie unique, instruments de régulation économique et financière, l’UE dispose de plus d’instruments que les autres organisations économiques régionales (MERCOSUR ou ALENA par exemple). Pourtant les disparités entre États et entre les territoires de ces États restent très fortes. Et les 27 États de l’Union ne participent pas aux mêmes mécanismes de stabilisation et d’harmonisation économique : c’est l’Europe « à géométrie variable ». Est-il possible, alors, de relever le défi de la cohésion territoriale et sociale en lissant les disparités socio-spatiales de l’Union ?

*         *         *

                L’Union Européenne (UE) rassemble (2007) 27 États européens (Sur les 54 États du continent). Autour du noyau des six États fondateurs (Traités de Rome, 1957, signés entre l’Allemagne, les États du Benelux, la France et l’Italie) se sont agrégés progressivement les États riverains de la Mer du Nord (1973) puis de la Méditerranée (1981-1986) puis de l’Europe scandinave et centrale (1990-1995)) et enfin, après la fin de la Guerre froide (1947-1991), les Pays de l’Europe Centrale et orientale (PECO, 2004-2007). Le processus est encore en marche puisque des négociations sont entamées avec la Turquie, la Croatie et l’Islande, alors que les États des Balkans nés de la désintégration de la Yougoslavie (La Serbie, le Monténégro, la Macédoine, le Kosovo, l’Albanie et la Bosnie-Herzégovine) ont déposé leur candidature. Regroupant plus de 500 millions d’habitants l’UE est aujourd’hui un des pôles de la Triade, pôle économique et financier d’envergure mondiale, porté par sa monnaie unique (L’Euro, €, 2002) partagée par 17 États (Bientôt 18 avec la demande d’entrée dans la zone € de la Lettonie, pays balte). Pensée par les pères fondateurs (Les démocrates-chrétiens comme Alcide de GASPERI, Robert SCHUMAN, Jean MONNET, Konrad ADENAUER par exemple) comme un marché commun destiné à partager les richesses économiques du continent pour éviter les guerres (Création de la Communauté Européenne du Charbon et de la l’Acier, CECA, 1954), la Communauté Économique Européenne (CEE) est devenue l’Union Européenne avec l’entrée en vigueur du Traité de Maastricht (1992). Le but initial des pères fondateurs a été atteint et les guerres interétatiques ont disparu depuis 1945 (L’UE a été élue Prix Nobel de la Paix, 2012). Ils avaient également proposé la méthode des « petits pas », une marche progressive vers plus d’intégration économique au rythme de la volonté des peuples et des dirigeants. Il en résulte une mosaïque institutionnelle (L’Europe « à géométrie variable »). Certains États de l’UE ne sont pas dans l’espace Schengen (Libre circulation des personnes, des biens et des capitaux, 1985) c’est le cas de la Grande-Bretagne et de l’Irlande par choix, et de la Bulgarie parce que les critères sécuritaires ne sont pas réunis. D’autres, qui ne sont pas membres de l’UE, sont dans l’espace Schengen (C’est le cas de la Confédération helvétique, de l’Islande et de la Norvège). Ces États constituent ce qu’il est de coutume d’appeler l’Espace Économique Européen (EEE) constitué de l’UE et des États de l’Association Européenne de Libre Échange (AELE) fondée à l’initiative de la Grande-Bretagne et tombée en désuétude. Certains États encore ont fait le choix de ne pas intégrer la zone € (C’est le cas de la Grande-Bretagne, du Danemark et de la Suède) tandis que d’autres ne réunissent pas encore les critères de stabilité financière (Inflation en dessous de 1,5%, dette publique inférieure à 60% du Produit Intérieur Brut, déficit des comptes publics inférieurs à 3% du PIB) comme c’est le cas pour les PECO en majorité. Le débat originel, l’Europe unie doit-elle être un simple marché commun ou un État fédéral de type étatsunien, n’est toujours pas tranché. Ce qui explique que « l’approfondissement » (La délégation croissante de souveraineté au bénéfice des institutions de l’UE comme la Commission européenne) connaisse des heurts et que certains États (France, Allemagne, Benelux par exemple) soient en pointe (Comme le montre ce qu’on nomme la « gouvernance financière de l’UE » pilotée par la Banque Centrale Européenne, BCE, et l’Euro-groupe des ministres des finances de la zone €) et d’autres en retrait (Comme la Grande-Bretagne qui propose un référendum pour sortir de l’UE !). Mais « l’élargissement » (L’entrée de nouveaux membres) est également en débat : de nombreux peuples européens refusent une extension de l’UE à l’infini vers l’Est, coûteuse (En termes de subventions distribuées par les instances de l’UE) et socialement dangereuse car ces populations moins bien payées sont plus compétitives (Ce qu’on appelle le « dumping social et fiscal »). Les débats autour de l’élargissement renvoient aussi à la question des limites du continent lui-même : alors qu’ils sont fortement intégrés dans la gestion des frontières extérieures de l’UE (FRONTEX) dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, les migrations illégales et le trafic d’êtres humains, les États comme la Turquie (Pourtant membres du Conseil de l’Europe) et le Maroc (pourtant membre de l’OTAN) sont suspectés de dénaturer le projet européen, sensément « chrétien ». Alors que certains États européens (Albanie, Bosnie-Herzégovine et Kosovo) sont majoritairement musulmans. Pourtant l’intégration de la République Turque de Chypre Nord (Inféodée à la Turquie et peuplée majoritairement de musulmans) pose moins de problèmes que celle des États du sud Caucase (Géorgie et Arménie) pourtant chrétiens depuis 2,000 ans ! On le voit la question de la construction européenne renvoie plus à nos représentations qu’à des critères soi-disant objectifs. Cela s’explique par le fait que la finalité même de l’Europe (L’Europe pour quoi faire ?) n’est pas encore résolue.

                Or les défis que l’UE doit relever sont très nombreux. Et c’est d’abord celui de sa cohésion intérieure qui se pose avec acuité. Comment construire l’Europe si certains territoires sont marginalisés ? Les disparités spatiales sont énormes : certaines Régions Ultra Périphériques (RUP) de l’UE en sont très éloignées (Comme c’est le cas des Antilles françaises distantes de 7,000 km et de la Nouvelle Calédonie située à 16,000 km de l’UE !). D’autres territoires sont très pauvres : si le PIB/habitant en Standard de Pouvoir d’Achat (SPA) dans le « Grand Londres » (Inner London) était en 2006 de 80,000 € il n’était que de 5,800 dans la région du Nord – Est de la Roumanie (Soit 14 fois moins !). Les disparités sont d’ailleurs socio-spatiales : les régions les plus éloignées de la Mégalopole européenne (De Londres à Milan) ou de l’Europe rhénane (De Rotterdam à Bâle) sont aussi les plus pauvres. Le taux de chômage en Martinique (22%) est 3 fois plus élevé qu’en moyenne dans l’UE (7%). L’espérance de vie en Guyane est de 10 ans (64 ans) moins élevée qu’en France métropolitaine. On retrouve à l’échelle de l’UE les mêmes disparités socio-spatiales que celles observées à l’échelle de la France : les villes (Londres est une ville mondiale), les régions littorales (La Randstad Holland autour de Rotterdam et d’Amsterdam) et les régions aux réseaux de transports très denses (Bavière, Italie du Nord, Île-de-France) sont plus riches et plus productives. Pour assurer la cohésion de son territoire l’UE dispose d’institutions et de budgets spécifiques et agit aux échelles régionales et locales. Le Programme de Cohésion mis en place lors du Traité de Lisbonne (2009) doit aboutir à une « cohésion économique, sociale et territoriale » et cible les régions européennes en fonction de leurs besoins spécifiques : 45% du budget de l’Union (soit 50 milliards d’€) pour la seule année 2010 (Cadre financier, 2007-2013) sont destinés au développement régional par le développement de la compétitivité des territoires. Ce qui représente un effort de 350 milliards d’€ sur 5 ans. Le Fonds Européen de Développement Régional (FEDER) gère 82% de cette manne afin d’aider les « régions en retard de développement » (Objectif dit « de convergence »), le Fonds Social Européen (FSE) en gère lui 16% destinés à « l’Objectif de Compétitivité Régionale et d’Emploi » (Innovation, aides aux entreprises, transports, emploi, « société de la connaissance » c’est-à-dire la recherche publique et privée). Les régions qui bénéficient de ces aides connaissent des croissances spectaculaires : l’Andalousie (Objectif de Convergence) a connu une croissance de son PIB de 7% en 5 ans (2001-2006) et les régions des PECO de +6% en moyenne. Seul le Grand Duché de Luxembourg connaissait de tels taux de croissance parmi les régions les plus développées. Mais au sein des États se sont souvent les régions les plus riches qui reçoivent les aides les plus efficaces : tandis que la Région Bretagne voyait 3,000 de ses projets cofinancés par l’UE les régions du Nord-Pas-de-Calais (Lille), de l’Île-de-France (Paris) et de Rhône-Alpes (Lyon) en voyaient cofinancées 6,000 chacune, soit le double. Les régions les plus enclavées du territoire français (Limousin) ou en sévère désindustrialisation (Auvergne) ne recevaient que moins de 1,000 projets cofinancés par l’UE. Il s’agit bien de favoriser la compétitivité des territoires, donc de développer les territoires les plus à même de s’insérer aux conditions du marché dans la mondialisation. Car derrière la compétitivité des territoires c’est bien de la puissance de l’UE à l’échelle mondiale dont il s’agit. La nature des projets financés reflète bien les préoccupations des fonctionnaires européens : la construction d’un pont sur le Danube (Coût 226 millions d’€ dont 70 pris en charge par l’UE) doit répondre à des objectifs de cohésion territoriale (Faciliter le passage de la frontière bulgaro-roumaine afin d’améliorer le raccordement de l’Europe du Sud – Est à la Turquie) et des objectifs environnementaux (Dynamiser le transport combiné Rail – Routes – Voies fluviales) mais on voit mal en quoi les populations riveraines bénéficieront de ce pont… « L’effet tunnel » leur assurera les nuisances (Paysage défiguré, bruit, mitage des terroirs) pour peu de retombées économiques locales. La répartition des fonds montre qu’assez injustement les pays les plus riches sont aussi les premiers bénéficiaires : la France est le premier récipiendaire des subventions européennes (14 milliards d’€ en 2009) devant l’Allemagne (12 milliards d’€) et très loin devant la Bulgarie (1 milliard, soit 14 fois moins !). Les politiques sectorielles, dont la Politique Agricole Commune, (PAC) qui soutient artificiellement la compétitivité des agricultures européennes sur les marchés mondiaux et par ricochet les Industries Agro Alimentaires (IAA), sont subventionnées par le Fonds Européen Agricole pour le Développement Rural (FEADER) absorbent 43% du budget de l’Union. L’aide à forte dimension sociale (Aides directes aux 15 États les plus en retard, ou les aides aux quartiers en difficultés dans le cadre du programme URBAN II, coopérations transfrontalières) ne reçoivent que 2,5% des fonds consacrés à la cohésion. On le constate, l’UE mène classiquement une politique d’aménagement des territoires destinée à insérer ses territoires les plus productifs dans la mondialisation.

*         *         *

                L’Union Européenne est une organisation en cours de définition mais dont les capacités d’action sont réelles (Son budget annuel est conséquent) et souvent spectaculaires (Monnaie unique). Ses orientations restent fortement guidées par les postulats libéraux et les impératifs d’un marché très ouvert sur la mondialisation.

© Erwan BERTHO (2013, révision 2017)

→ Téléchargez le document principal au format Microsoft Office Word .doc :

COMPOSITION corrigée 7 De l’espace européen aux territoires de l’Union Européenne

ARTICLES CONNEXES :

Cliquez ICI pour accéder à l’index de la catégorie Union Européenne & Northern Range.

Cliquez ICI pour accéder au programme de Géographie des classes de Premières générales.

Print Friendly, PDF & Email