CORRECTIONS D’HISTOIRE – Composition Première – « Croissance et mondialisation XIXe siècle – début du XXIe siècle. »

Corrigé élève

COMPOSITION

Croissance et mondialisation : les économies – monde successives (britanniques, américaine, multipolaire) depuis le début du XIXe siècle. 

Vous montrerez comment s’est ébauchée progressivement la mondialisation libérale des économies qui dessine aujourd’hui l’économie monde contemporaine ? 

                La mondialisation libérale des économies façonnant aujourd’hui l’économie-monde contemporaine s’est construite principalement autour de trois économies-monde, qui se sont succédées (Respectivement l’économie-monde britannique entre 1850 et 1920, l’économie-monde américaine entre 1920 et 1975 et l’économie-monde multipolaire depuis 1975). Une économie-monde est un espace organisé autour d’un État et pour son seul profit d’après le sociologue WALLERSTEIN. Cet espace a un centre, des périphéries intégrées et qui participent au développement impulsé par le centre et des marges subordonnées et exploitées. Depuis le début du XIXe siècle, l’économie est influencée par le capitalisme libéral (Système assis sur la propriété privée des moyens de production, et l’initiative personnelle dans la création des entreprises). L’État intervient peu dans l’économie.

                Comment ces trois économies-monde successives ont contribué à l’ébauche progressive de la mondialisation libérale des économies actuelles ?

                On tentera de répondre à cette problématique à travers l’étude des trois moments d’apogée des économies-monde successives, à savoir l’économie-monde britannique (I.), l’économie-monde américaine (II.) et l’économie-monde multipolaire.

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                                La domination de l’économie-monde britannique s’étend d’approximativement 1815, date de l’effondrement géopolitique de la France après le Ier Empire, à 1920, date où, ruinée par la Première Guerre mondiale (1914-1919), l’économie-monde britannique cède la place à de nouveaux compétiteurs.

Deux vagues d’industrialisation permettent l’empire britannique de devenir une grande puissance industrielle. En effet, en 1850, la Grande Bretagne a une production charbonnière quatre fois supérieure à celle des États allemands, elle représente alors 40% du commerce mondial de produits manufacturé et détient 66% des stocks d’or mondiaux. Près de la moitié du réseau ferré mondial est britannique. Dès 1870 sa production d’acier est supérieure de deux fois celle des États-Unis. La période de croissance de l’économie-monde britannique est la plus forte entre 1848 et 1873, la Grande Bretagne insuffle donc les rythmes de l’économie au reste du monde.

                Possédant la plus grande flotte marchande et la plus puissante flotte de guerre, la Grande Bretagne représente le tiers du fret maritime mondial. La City de Londres, capitale qui devient l’hyper-centre mondial, va imposer ses règles financières aux autres économies européennes. Par exemple, la moitié des transactions financières se font alors en Livre Sterling (£), une monnaie indexée sur le fabuleux stock d’or britannique. La Livre Sterling devient la monnaie des échanges internationaux. La Grande Bretagne est la première économie à adopter sans réserve la politique du libre-échange au milieu du XIXe siècle : cette politique consistant à la suppression des entraves aux échanges de marchandises et de capitaux, notamment en baissant les tarifs douaniers, contribue à la croissance de l’économie-monde britannique. Mais l’industrie britannique se protégeait de la concurrence étrangère en pratiquant par ailleurs l’exclusif colonial, un système protectionniste déguisé à l’échelle de l’Empire colonial de la Grande Bretagne. Elle obligeait alors ses colonies à lui vendre leurs ressources en matières premières, et les contraignait à lui acheter ses surplus manufacturés. L’avance technologique de la Grande Bretagne lui conférait un avantage technologique et commercial qui protégeait son industrie des industries naissantes françaises ou allemandes. La domination britannique s’estompe avec la Première Guerre mondiale (1914-1919), puisque les dépenses militaires réglées aux États-Unis l’ont été avec l’or des banques.

                               Les États-Unis profitent de la ruine des États européens après la Première Guerre mondial pour accélérer leur essor économique essentiellement industriel. 

Les États-Unis représentent 1/6e des importations mondiales, ce qui montre les besoins de leur société, dite de consommation, et les appétits de leur industrie. L’économie-monde américaine est également capitaliste et libérale : son hyper-centre se trouve à New York, le cœur financier de cet État continent. La Seconde Guerre mondiale (1939-1945) permet aux États-Unis, peu touchés par les destructions matérielles de la guerre, de proposer au monde un projet global de croissance et de paix. En effet, selon l’administration de ROOSEVELT (1932-1945) et de TRUMAN (1945-1952), les régimes totalitaires, nés de la misère, sont la cause de la guerre. La misère qui sécrète la guerre et les régimes totalitaires va faire basculer le monde dans le communisme (Propriété publique des moyens de production). Le système de Bretons Wood (1944) créé le Fonds Monétaire International (FMI) pour soutenir la valeur des monnaies et empêcher les dévaluations compétitives, le World Bank Group (WBG) autour de la Banque Internationale de Reconstruction et de Développement (BIRD), chargé d’appuyer les projets d’investissements des États membres, et l’Organisation des Nations Unies (ONU) chargée d’instaurer et de maintenir la paix dans le monde.

                Le Krach boursier de 1929 avait entraîné le monde dans une crise systémique que les États-Unis avaient commencé à surmonter en adoptant les théories de Keynes sur la relance de l’économie par la relance de la consommation et l’intervention de l’État dans l’économie, notamment en finançant des politiques de grands travaux. Progressivement après la Seconde Guerre mondiale la société américaine était entrée dans la société de consommation. Le fordisme garantissait une production de masse à moindre coût et des produits manufacturés bon marché, accessibles aux classes populaires et moyennes. Le plan Marshall (1947) garantissant un prêt à taux zéro sans échéance de remboursement aux États qui le sollicitaient, offrit plus de 12 milliards de dollars-Or aux pays européens occidentaux. La reconstruction rapide des économies européennes permet le développement par ricochet de l’industrie américaine, qui sort ainsi en douceur d’une économie de guerre pour passer à une économie de paix. Dans le même temps l’Europe de l’Ouest s’arrime au bloc pro-américain dans la « Guerre froide » (1947-1991) qui commence. Dès 1945 les États-Unis sont une superpuissance (Statut qu’ils partagent avec l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques, URSS, et ses alliés communistes). Leur monnaie, le dollar américain (US$), est la monnaie des transactions internationales : seule monnaie immédiatement convertible en or (Les États-Unis concentrent alors 66% des stocks d’or mondiaux), elle devient la monnaie des réserves de change. Les États-Unis sont entre 1945 et 1975 le moteur d’une économie-monde qui prend fin entre 1972 (Fin de la convertibilité or fixe du dollar US$) et 1976 (Sommet de la Jamaïque). L’endettement américain, le déséquilibre constant de la balance commerciale et de la balance financière, l’inflation (+12%/an) entraînent l’abandon du Système Monétaire International (SMI) des taux de change fixes.

                               La fin de la domination économique américaine absolue (1975-1980) laisse la place à une économie-monde multipolaire. 

L’économie-monde multipolaire est caractérisée par l’existence de plusieurs pôles de puissance : aux côtés de la Triade (Amérique du Nord, Asie orientale et Europe de l’Ouest) les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et South Africa) et les pays émergents (Comme les Nouveaux Pays Industrialisés d’Asie de 2e génération, NPIA-2, comme la Thaïlande ou l’Indonésie) profitent de la mondialisation libérale. Même si l’ancienne Triade domine encore le monde (80% du Produit Intérieur Brut mondial, PIB, et les trois quarts des échanges de biens manufacturés, 8 des 10 premières universités mondiales sont américaines…), les nouvelles puissances émergentes concentrent la production industrielle mondiale, y compris celle à destination de la Triade.

                En République Populaire de Chine (RPC), l’entreprise de téléphonie ZTE est devenue un leader mondial. Elle réalise 40% de la production de téléphone cellulaire dans le monde. Les taux de croissance des BRICS, même s’ils décroissent (+12% de PIB entre 2002 et 2012 en Chine, 7,5% en 2014), restent très supérieurs à ceux des Pays Anciennement Industrialisés (PAI) comme la France (+0,5% en 2013, +0% en 2014 !). Soit pour les BRICS des taux de croissance du PIB supérieur à la croissance mondiale moyenne (+6%). L’émergence concomitante de nouvelles puissances au Sud a permis l’émergence de partenariats Sud-Sud pour rivaliser avec la Triade dans les rapports de force géopolitiques. Le cas le plus célèbre est ce qu’on appelle la « Chinafrique », depuis que l’Afrique est le terrain privilégié des investissements en BTP de la RPC. Cependant la logique libérale des économies n’est pas remise en question par ces nouvelles puissances du Sud.

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                               La succession des trois économies-monde (Britannique, américaine, multipolaire) a permis la mise en place progressive d’une économie-monde libérale à l’échelle de la planète. Les puissances du Sud ne remettent pas en cause cette logique libérale.

© Cédric N’GAMBA (2014).

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