DEVOIRS & CORRECTION – Correction d’une étude critique d’un document de Géographie – Terminales générales – Des cartes pour comprendre le monde.

TS Géographie – Des cartes pour comprendre un monde complexe – Analyse de document – Proposition de corrigé

Analysez le document proposé et évoquez ses limites afin d’identifier dans quelles mesures il permet de rendre compte des inégalités de développement dans le monde contemporain.

Aperçu 1 « Document à étudier : La répartition des bidonvilles dans le monde. »

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Le logement est un indicateur qui révèle de façon efficace les niveaux de développement des territoires et les conditions de vie des populations. Tout le monde connait la photographie de Tuca Vieira sur laquelle la favela de Paraisopolis à Sᾶo Paulo fait face à une résidence fermée avec piscines et courts de tennis. Cette image symbolise l’essor des inégalités sociales, une des conséquences majeures de la globalisation.

La carte intitulé « Population vivant dans les bidonvilles, 2005 », réalisée par Benoît Marin grâce à des données de UN Habitat et publiée en 2011 par l’Atelier de Cartographie de SciencePo aborde cette la question des inégalités de développement à travers l’étude de la répartition des personnes vivant dans des bidonvilles. Cette carte a été publiée par des universitaires français au moment où, trois ans après le début de la crise financière, on assiste à l’augmentation des inégalités et à la précarisation des conditions de vie des plus humbles. Le 11ème Forum Social Mondial s’est déroulé en Février 2011 à Dakar. Il a réuni des personnalités altermondialistes soucieuses de mettre en place des alternatives à un capitalisme en crise.

Dans quelles mesures la carte proposée permet de rendre compte des inégalités de développement dans le monde contemporain ?

Si cette carte montre bien que les inégalités existent à toutes les échelles, elle donne cependant une vision tronquée et vague de ce phénomène.

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Le principal intérêt de cette carte est de proposer simultanément deux visions de la répartition des populations vivant dans des bidonvilles dans le monde.

Un cercle indique le nombre de personnes vivant dans des bidonvilles dans chaque pays. La carte indique des stocks de personnes et distingue les Etats du monde grâce à un système de cercles proportionnels. La Chine apparaît alors comme l’Etat où on rencontre le plus de personnes vivant dans des bidonvilles. En 2005, environ 174,5 millions de chinois vivaient dans des bidonvilles. Viennent ensuite l’Inde, le Brésil, le Nigéria et l’Indonésie avec respectivement 110,2 millions, 45,5 millions 41,6 millions et 28,1 millions de personnes vivant dans des bidonvilles. Les effectifs sont beaucoup plus faibles dans le reste du monde. Au Chili on dénombrait en 2005 environ un million de personnes vivant dans des bidonvilles. Il semble avoir autant de personnes vivant dans des bidonvilles au Nigéria que dans toute l’Afrique du nord (Maroc, Algérie, Tunisie, Libye, Egypte). On se rend compte que les pays émergents (Chine, Inde, Brésil, Nigéria) concentrent un grand nombre de pauvres. Ils connaissent une croissance économique rapide qui n’est pas toujours synonyme de développement. Le Brésil vient d’organiser les Jeux Olympiques mais de nombreux brésiliens vivent encore dans des logements précaires et insalubres. Lagos est la vitrine de l’émergence du Nigéria mais des milliers de personnes vivent dans le bidonville de Makoko.

La carte distingue également les Etats du monde en fonction du taux de personnes vivant dans des bidonvilles. Le mode de discrétisation choisi distingue quatre groupes d’Etats. Les Etats dans lesquels une faible partie de la population totale (entre 1,7% et 21,5%) vit dans des bidonvilles apparaissent en rose pale. On trouve dans cette catégorie le Mexique, le Maroc et la Turquie. Les Etats dans lesquels une part significative de la population (entre 21,5% et 45,5%) sont colorés en rose. La Chine, l’Inde, l’Argentine et l’Iran font partie de cette catégorie. Dans certains Etats, plus de la moitié de la population (entre 45,5% et 66,5%) vit dans des bidonvilles. Ils apparaissent en rose foncé. Il s’agit par exemple de la Bolivie, du Kenya et de la Birmanie. Les Etats dans lesquels une majorité de la population vit dans des bidonvilles (entre 66,5% et 99%) sont colorés en rouge. La Mauritanie, le Soudan, Madagascar, le Yémen et le Laos font partie de cette catégorie. En 2005, près de 99% de la population d’Afghanistan vivait dans des bidonvilles.

L’Afrique subsaharienne apparaît comme la région du monde où on trouve les taux de personnes vivant dans des bidonvilles les plus importants. Cette donnée illustre le fait que la majorité des habitants de cette région du monde souffrent du « mal-développement ». L’Afrique subsaharienne comporte 34 Etats classés dans les Pays les Moins Avancés (PMA). Elle laisse également apparaître les Etats concernés par des conflits. Les violences et l’insécurité créent un contexte propice à l’essor de logements informels.

Cette carte fait donc apparaître une géographie de la pauvreté et des conflits. Elle nous donne une vision critique des pays émergents. C’est un outil utile à la compréhension des enjeux du monde contemporain.

Elle comporte cependant des limites et n’est pas entièrement satisfaisante.

Tout d’abord, le sujet cartographié est flou. La catégorie « bidonville » manque de précision. Ce terme français désigne des maisons construites avec des matériaux de récupération. On qualifie de bidonville un logement précaire et informel. Cette catégorie regroupe une grande diversité de situations. Quels rapports entre les gecekondu turcs, logements auto-construits illégaux généralement en béton et connectés aux réseaux d’eau et d’électricité et les slum de Lagos, quartiers insalubres constitués d’alignement de cabanes en tôle ? Le quartier de Dharavi à Mumbai est considéré comme le plus grand bidonville d’Asie. De nombreux artisans habitent dans ce quartier, des entrepreneurs y ont même ouverts de petites usines.

Le recueil des données statistiques et la mise en page de la carte laissent penser qu’il n’y a pas de bidonville en Europe de l’ouest et en Amérique du nord. La précarité existe pourtant au cœur des villes des pays développés. La carte est trop ancienne pour mentionner la jungle de Calais, quartier informel où vivent de nombreux migrants ayant fui les violences au Moyen-Orient. Elle aurait tout de même pu mentionner les ghettos des grandes métropoles étatsuniennes et les camps roms situés à la périphérie des grandes villes françaises.

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La carte proposée, en présentant un aperçu de la distribution des personnes vivant dans des bidonvilles, nous permet d’approcher la complexité du monde contemporain. Les logiques de la globalisation produisent un monde dans lequel les inégalités sont présentes à toutes les échelles. L’Afrique apparaît comme un continent souffrant du « mal-développement », de nombreux ménages restent à l’écart de la croissance dans les pays émergents (Chine, Inde, Brésil).

Les choix opérés par les cartographes (catégorie utilisée, recueil et traitement des données, mise en page) illustrent la vision du monde du commanditaire de la carte. Elle laisse penser qu’il n’y a pas de logement informel en Europe de l’ouest et en Amérique du nord. Cette vision du monde, simpliste, n’est pas satisfaisante.

La distribution des bidonvilles est une clé de lecture importante pour aborder le thème des inégalités de développement et au-delà, pour comprendre la complexité du monde contemporain. L’étude d’autres cartes et la mise en place d’autres démarches d’analyse pourraient permettre de construire une vision du monde plus objective et plus complète.

© Ronan KOSSOU (septembre 2016)

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