ZOOM SUR … – Histoire – Premières & Terminales, « L’épuration en France (1944-1953) »

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L’ÉPURATION EN FRANCE (1944-1953)

L’épuration en France est le terme par lequel on désigne l’éviction des personnes ayant collaboré avec le régime nazi (1933-1945) soit directement durant l’occupation (1940-1945) soit via le régime de l’État français dont la capitale était Vichy (1940-1944).

Collaboration et collaboration d’État en France (1940-1945)

En juin 1940, la France entrée en guerre contre le régime nazi (1er septembre 1940) est vaincue après une campagne militaire de moins de 6 semaines. Les pouvoirs sont confiés au Maréchal Philippe PÉTAIN, héros de la Première Guerre mondiale (1914-1919) notamment lors des batailles de la Marne (1914), de Verdun (1916-1917), lors des grandes mutineries (1917) où sa relative souplesse dans le maintien de l’ordre le fait entrer dans le cœur des soldats. Il commande les armées françaises lors de la victoire (1918).  Il s’empare des pleins pouvoirs (juin 1940) et instaure un régime dictatorial, nationaliste, xénophobe et antisémite. Il entame une politique de collaboration d’État avec les Nazis qui entraîne l’extermination d’une partie de la population juive de France (76 000 déportés, 3% de survivants), le départ de travailleurs français en Allemagne (le Service du Travail Obligatoire, STO), la livraison de matières premières vers les industries du IIIe Reich, la constitution d’unités de volontaires français dans la SS (Division Charlemagne), et une répression cruelle contre les opposants (Attaque du plateau des Glières par la Milice de DARNANT). En parallèle se développe par conviction idéologique et par intérêt une collaboration avec les Nazis issus de Français n’ayant pas de rapport fonctionnels avec l’État mais travaillant de concert avec les Nazis : c’est le cas de romanciers (DRIEU LA ROCHELLE), de journalistes (BRASILLACH) ou d’industriels (RENAULT).

Modalités juridiques et administratives de l’épuration

Face aux risques de vengeance populaire, les organismes qui coordonnent la Résistance ont lancé depuis 1943 (Conseil National de la Résistance, CNR) et 1944 (Les radios de Londres, siège des Forces Françaises Libres, FFL, et Alger, siège du Comité Français de Libération Nationale, CFLN) des appels à la retenue dans les exécutions de collaborateurs. Le territoire libéré, les tribunaux sont d’abord militaires mais ils statuent en vertu du Code pénal (Article 75 condamnant l’intelligence avec l’ennemi et 83 condamnant les actes nuisibles à la Défense Nationale). Les Comités Départementaux de Libération (CDL) supervisent rapidement l’instruction des dossiers, les Commissaires de la Républiques envoyés par DE GAULLE procèdent aux internements administratifs (130 000 internés), souvent afin de les soustraire à la vengeance populaire. Dès octobre 1944 le général DE GAULLE appelle à l’indulgence et il gracie systématique les femmes, les mineurs et les complices et commue leur peine capitale en peine d’emprisonnement. La hantise des pouvoirs publics et des partis politiques est de voir survenir en France une terreur de type révolutionnaire échappant à tout contrôle : elle nuirait aux efforts français pour garder le contrôle du pays alors que les Américains veulent mettre la France sous administration militaire.

Bilan de l’épuration

Au total 9 800 personnes ont été tuées entre 1944 et 1945 pour fait de collaboration : 75% avant octobre 1944, soit pendant les périodes de combats en France. Seules 800 personnes ont été condamnées à mort par des tribunaux, les autres ont été sommairement exécutées par la foule ou des tribunaux improvisés. Sur 170 000 dossiers transmis aux différentes justices (Cour de Justice, Chambres civiques et Haute Cour de Justice) on compte 4% de condamnation à mort (dont 1/10 est réellement exécutée), 25% écopent de peine de prison, 25% de la peine de dégradation nationale (Privation des droits civiques) et 45% de non-lieu ou d’acquittement. Les femmes (Chevelures tondues, humiliées en place publique) les ruraux, les jeunes et les pauvres sont plus frappés que les citadins, les cadres et les riches : 33% des patrons sont acquittés, 25% des commerçants, 10% des ouvriers… En 1948, 68% des condamnés sont libérés, en 1950 les fonctionnaires démis de leurs fonctions sont réintégrés, en 1951 et 1953 des lois d’amnistie sont votées. En 1953, seul 1% des condamnés sont encore détenus. Si 65% des Français considèrent alors que l’épuration a été insuffisante, le mythe d’une France unie dans la résistance permet d’aller de l’avant. La France a donc décidé d’oublier plutôt que de se pencher sur son passé. Les lois d’amnistie furent aussi des lois d’amnésie.

© Erwan BERTHO (2015, révision 2017)

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