Tale – HISTOIRE (11), Un nouvel ordre mondial : les fondements de l’État-providence en Occident. 

Tale – HISTOIRE (11), Un nouvel ordre mondial : les fondements de l’État-providence en Occident. 

                                L’immédiat après-guerre (1944-1947) voit le monde industrialisé mettre progressivement en place des systèmes de protection sociale patronnés par les pouvoirs publics, ce qu’on appelle dès lors des « États-providence » (Welfare state). Comment comprendre cette conversion des pays riches aux bienfaits de la protection sociale ?

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                Le rapport Social Insurance and Allied Services de Lord William BEVERIDGE (1942) est souvent considéré comme l’acte de naissance de l’État-providence. Pourtant tout le XXe siècle se caractérise par une marche lente vers la mise en place de mécanismes de protection sociale : les dépenses sociales qui représentaient 5% du PIB en 1880 en France en représentent 15% en 1930 et 30% en 1950. BEVERIDGE fut d’ailleurs le premier directeur des services du chômage (1909) et l’inspirateur du National Insurance Act (1911), preuve qu’en Grande-Bretagne la naissance de l’État-Providence résulte d’une longue évolution. En Allemagne, Otto von BISMARCK met en place (1880-1890) un système d’assurances d’entreprise (Chômage, accident, vieillesse) qui assure aux cotisants une protection sociale inégalée en Europe mais réservée aux travailleurs. Le paternalisme d’entreprise au XIXe siècle voit des grands patrons de l’industrie mettre en place des caisses de solidarité et des villes ouvrières modèles, tandis que les syndicats développent activement les caisses mutualistes pour protéger leurs membres des accidents de la vie (Accidents du travail, chômage). La « Grande Dépression » aux États-Unis et dans le monde (1929-1939) a entraîne par ailleurs une refonte de l’action de l’État dans l’économie : par le biais du New Deal (1932-1939) de ROOSEVELT, notamment, l’État devient employeur pour combattre une crise économique devenue « systémique ». En France, les Accords Matignon (1936) font de l’État l’arbitre des relations sociales et le Conseil National de la Résistance (CNR, Les jours heureux, 1943-1944) esquisse un programme de Sécurité sociale qui sera mis en place lors de la IVe République (1946-1958).

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Les mécanismes de protection sociale dans les grands pays industrialisés vont dans le double sens d’une protection contre les « fléaux de la vie » (BEVERIDGE) et pour la garantie d’un revenu minimum. Cette dernière idée est inspirée des travaux de John Maynard KEYNES. La rupture qu’incarne BEVERIDGE est que la protection sociale est financée par l’impôt, donc par la solidarité nationale, et que les ayants droits reçoivent en fonction de leurs besoins et non en fonction de leur cotisation. En France des ordonnances instituent la Sécurité Sociale dès 1945, le salaire minimum (SMIG) est créé en 1950, les congés payés sont étendus (1956) et en 1958 l’assurance chômage est gérée par deux organismes (UNÉDIC et ASSÉDIC). Le système français tente une synthèse entre le système beveridgien (Accès pour tous) et bismarckien (Système d’assurance et de cotisations). L’originalité réside dans le fait que la gestion est confiée aux partenaires sociaux (Syndicats de patrons comme le CNPF et syndicats de travailleurs). En Allemagne, le système bismarckien est conservé dans ses grandes lignes : la cogestion (Gestion des grandes entreprises conjointe entre syndicats et patronat) fait entrer la démocratie dans la vie des entreprises. Il reste qu’aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale la couverture sociale reste modeste : en Grande-Bretagne comme en France il faudra des assurances spécifiques et des impôts supplémentaires pour atteindre les objectifs de justice sociale. Aux États-Unis, l’assurance chômage est instituée en 1935, l’assurance vieillesse en 1939 : si l’État fédéral définit le cadre règlementaire, ce sont les collectivités territoriales (Comtés, États fédérés) qui assurent la définition des modalités de versement des aides. Lors de l’élection de John Fitzgerald KENNEDY (1960), seule une faible part des Américains bénéficie des assurances sociales publiques, les conditions d’accès étant très restrictives.

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La « Guerre froide » (1947-1991) est marquée par le rayonnement des deux supergrands dont l’URSS : les réalisations sociales des États totalitaires furent souvent des trompe-l’œil, comme le montre la dégradation de la condition sociale des ouvriers allemands sous le régime nazi (1933-1945). Mais les pays communistes affichent des performances remarquables dans les domaines de l’éducation, de la santé, des loisirs sportifs et culturels et du plein emploi. Dans le cadre de la lutte contre le communisme, les dirigeants de l’Ouest ont tout intérêt à mettre en place des systèmes de protection sociale qui garantissent la protection de la misère, le système capitaliste se prétendant le plus apte à apporter la prospérité. L’Europe met en place des systèmes sociaux ambitieux qui soutiennent la croissance mais aussi affaiblissent les audiences des partis communistes en Europe de l’Ouest : la social-démocratie allemande (SPD) renonce au marxisme lors du Congrès de Bad-Godesberg (1959).

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                La mise en place de l’État-providence en Europe de l’Ouest se généralise au lendemain de la Seconde Guerre mondiale : destinée à protéger les Européens de la misère, donc à les éloigner des tentations totalitaires et de la guerre, elle soutient la forte croissance des « Trente glorieuses » (1945-1975, Jean FOURASTIÉ) mais soulève les critiques des ultralibéraux (HAYEK, FRIEDMAN).

© Souleymane ALI YÉRO, Erwan BERTHO & Ronan KOSSOU (2020)

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